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And They're Off !!

And They're Off !!

chroniques sur les courses hippiques de tous temps.


Une décennie d'exploits pour un cheval roi.

Publié par And They're Off sur 27 Février 2014, 00:37am

Une décennie d'exploits pour un cheval roi.

On l'apprenait il y a peu, Kasbah Bliss ne posera plus un sabot sur une piste de course. Celui qui découvrait ce monde avant moi, et qui m'accompagnait dans ma soif de connaissance, m'éblouissant de son savoir, de sa maitrise, et de son courage, va disparaître de mon écran. Hyperactif, le poulain ridé s'en va découvrir d'autres vies, d'autres activités, avec l'envie de ses premiers jours et la force de tant d'années. Je ne suis pas triste, cela faisait des années que j'attendais son retrait, que sa page se tourne enfin, aussi douce et immaculée qu'à la sortie d'une imprimerie.

Mais il ne suffirait pas d'une seule feuille de papier pour parler de Kasbah Bliss. Son histoire relève de l'exploit, des espoirs qui soulèvent tant d'émoi.
Lorsque François Doumen, son mentor, annonça la nouvelle, il fut, bien heureusement, sollicité de tous. Il parla de son cheval bai, à la musculature établie et robuste. Il parla de ce cheval qui était devenu un symbole parmi les coursiers, un exemple pour ses amis à quatre jambes, un rêve pour nous autres bipèdes.
Kasbah Bliss faisait parti de la vie, nous accompagnant périodiquement durant dix ans.
Lorsqu'il posait ses sabots de jeune prince à Deauville, aux prémices de son éblouissante carrière, je n'avais que douze ans. Je regardais les chevaux s'élancer des stalles sur la chaîne câblée, me permettant la course si elle se composait de sprinteurs, puis galopait à mon tour à bon train jusqu'au collège qui rouvrait ses portes pour l'après-midi. Je n'avais pas encore fait la connaissance d'Ainebe, pourtant il avait dû se déployer sous mes yeux novices. Mais mon histoire avec les courses n'avait pas réellement débutée.
Poulain, tout comme moi, Kasbah Bliss se confrontait à sa vie.
Il remportait sa première course à Angers, puis à l'âge des classiques, un handicap à Chantilly où il se montrait déjà adepte de l'endurance.
Un jour de décembre 2009, enchaînant les places courageuses et les victoires brillantes, le cheval au cœur intact amena sa famille pour un voyage à Hong Kong. Il devait se produire à Sha Tin dans le Hong Kong Vase, course d'élite des pur-sangs adeptes de la distance classique. L'ultime compétition avant l'affaissement du rideau sur une année hippique des plus chargées.
L'animal s'était fait les jambes sur les quatre mille mètres du Cadran, et descendait considérablement en matière de distance. Seulement, François Doumen, à qui Kasbah Bliss ne pouvait rien cacher, avait observé la hargne de son cheval lors de la ligne droite précédente, et les partiels sur les quelques centaines de derniers mètres qui avaient été avalées à la manière d'un Sea The Stars seul au poteau du Prix de l'Arc de Triomphe, le jour-même.
En Extrême-Orient, Kasbah Bliss s'adapte au train, et à la lancée du peloton sur le dernier tournant. Entrée de ligne droite, il prend du temps pour retrouver toute la sensation de ses appuis et s'accroche à l'accélération de la pouliche verte et rouge, se prenant au jeu des retrouvailles avec celle qui devait porter les mêmes couleurs que son bourreau de Longchamp, Alandi. Puisqu'il s'était lancé un instant en retard, Kasbah Bliss ne parvint pas à refaire plus de distance sur sa camarade Daryakana qui remportait la course, ni sur Spanish Moon, déjà dans la lutte, qui le repoussait d'un souffle nasal au bout du podium.
Mais de toutes ses courses, et de tout son parcours, cette ligne droite fut pour son ami François Doumen, la plus aboutie, la plus émouvante. Car l'animal, âgé alors de sept ans, avait montré tout son potentiel, à l'heure où ses premiers camarades de jeu pavanaient déjà devant leur jumenterie, leur première carrière depuis longtemps accomplie.
Seulement, pour parvenir, au fil des années, à remporter un tel classement en international, Kasbah Bliss n'avait pas fait calmement ses armes sur la douce piste de Longchamp, mais sur celle, plus difficile, du temple de l'obstacle, Auteuil, glanant des groupes et des accessits de grands triomphes derrière les spécialistes et imperturbables Zaiyad, Mid Dancer et Princesse d'Anjou. Sur les haies, dans le convoité Prix Carmarthen, il avait essuyé les larmes de Mid Dancer qui connaissait alors sa toute première défaite sur sa piste de prédilection, et devançait brillamment Monoalco qui se fit un nom en quelques victoires de prestige.
Mieux encore, il avait remporté quelques faciles victoires sur le sol anglais, et avait lutté au poteau avec Inglis Drever lors du meeting de Cheltenham.
Deux années après son exploit principal, Kasbah Bliss trouvait les ressources pour rejoindre les déchaînés de la célébrissime Gold Cup d'Ascot, s’octroyant une septième place aussi belle que si elle avait été faite d'or.
Quelques mois plus tard, le cheval remportait enfin le Prix du Cadran, son sacre parmi l'élite des stayers, son passeport vers la gloire infinie. Elle lui avait échappé à maintes reprises, honorant Bannaby, Alandi et Gentoo avant lui.
Le deux octobre 2011 à Longchamp, Kasbah Bliss patiente derrière les jeunes pousses aux jambes robustes, puis se lance, les traversant en un coup de rein. Le cheval se fait léger, puissant, et calculateur. D'un bond, il se sent plus jeune que jamais, et finit à la vitesse du vent.
Mais l'emprise du temps ne pouvait davantage patienter.
Kasbah Bliss courut encore quelques courses avec ses amis de longue distance, sans parvenir à les devancer de nouveau.
Raisonnable, François Doumen met un terme à la carrière de son éternel poulain, lui qui, il y a quelques matins encore, bondissait sur les pistes, infatigable adepte des franches camaraderies. Un avenir plus tranquille l'attend déjà, rythmé par les balades relaxantes et les enjambées enfantines. Son bonheur ne fait aucun doute.

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A
Un bien bel hommage à Kasbah Bliss ainsi qu'à François Doumen !<br /> Bizzz,<br /> Agnès Baboo
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